Elections législatives : carnets de campagne(5)
Après avoir déposé leurs dossiers la semaine dernière (voir carnets n°4), sept nouveaux partis politiques ont été agréés selon un communiqué du ministère de l'Intérieur. La procédure a été rapide, voire expéditive. Au total jusqu’ici, une trentaine de nouveaux partis ont été agréés. Selon le communiqué, une nouvelle fournée est attendue « ultérieurement ».
« On ne connaît rien des motivations ou des programmes de ces nouvelles organisations mises en ordre de marche », commente Djaffar Tamani dans l’éditorial d’El Watan aujourd’hui. L’éditorialiste, évoquant la difficulté de recourir en 2012 aux anciennes techniques de fraude, affirme : « Il est clair que nous assistons à une forme élaborée des méthodes de contrôle des élections ».
Un jour, un parti
De nouveaux partis politiques sont agréés à tour de bras, créant une inflation inattendue de formations présentes sur la scène nationale. Bientôt, le citoyen sera plongé dans une profonde solitude devant la multiplication des sigles qui partiront à la conquête des suffrages. Une trentaine d’organisations fraîchement émoulues du département de Daho Ould Kablia sont projetées, en l’espace d’un mois, sur l’échiquier politique national à la veille d’un important rendez-vous électoral. La cadence est quasiment d’un nouveau parti par jour.
Alors que la machine à agréer les partis est restée grippée pendant une douzaine d’années, elle s’est soudainement emballée au point que les dossiers des demandeurs d’agrément sont à présent traités en moins de 48 heures, selon la dernière déclaration du ministre de l’Intérieur.
Le chemin de l’activité politique dans le pays est désormais pavé de dizaines de nouvelles formations. En dehors des consternantes initiatives autour de la marchandisation
des listes électorales, ou la recherche de candidatures par le biais d’annonces dans les journaux, on ne connaît rien des motivations ou des programmes de ces nouvelles organisations mises en
ordre de marche.
S’agissant des intentions du pouvoir, il est clair que nous assistons à une forme élaborée des méthodes de contrôle des élections, la fraude ne pouvant plus être exécutée selon les mêmes procédés que lors des inénarrables scrutins ayant marqué ces quinze dernières années. Après avoir survécu aux ondes de choc des révoltes populaires ayant ébranlé et balayé des systèmes autocratiques dans les pays voisins, le pouvoir, dans notre pays, se paie le luxe d’imposer son jeu dans des élections législatives qu’il n’a pas peur de perdre. La suffisance affichée par les gouvernants frise le cynisme lorsqu’ils annoncent les gagnants et les perdants des prochaines élections.
«L’Algérie a besoin d’une opposition forte», déclarait récemment le président de l’Assemblée nationale, qui regrettait le boycott des élections par un parti de l’opposition démocratique. Des forces politiques ont ainsi pour vocation, selon les décideurs, d’animer et de rester dans l’opposition. Et les gouvernants de régner sur le pays en se jouant de l’Histoire et de la démocratie. Pour faciliter cette entreprise d’accaparement du pouvoir, les éminences grises du système en place concoctent un paysage politique clés en main et projettent des têtes d’affiche sans passé, sans parcours et sans programme.
Djaffar Tamani, 19 mars 2012. El Watan