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Publié par Saoudi Abdelaziz

La Gloire des imposteurs

 

 

La gloire des imposteurs, lettres sur le Mali et l’Afrique. C'est le nouveau livre publié par Aminata Traore et Boubacar Boris Diop aux éditions Philippe Rey. La Gloire des imposteurs met en évidence une reprise en main néo-impériale de l’Afrique subsaharienne par une violente agression militaire se présentant comme une odyssée morale, généreuse et désintéressée. Mais, un an après, il y a lieu de se demander si, comme l’Amérique de Bush en Irak, la France n’a pas pavoisé un peu tôt au Nord-Mali où elle est en train de s’embourber. Au-delà du Mali, véritable cas d’école, les deux auteurs partagent leurs réflexions sur l’énigmatique printemps arabe et sur les guerres de l’Occident hors de ses frontières, en particulier en Afrique – Côte d’Ivoire, Libye... Et chaque conflit leur offre l’occasion de mettre à nu les mécanismes de la même triomphante imposture.

A l'occasion de la sortie hier de son l'ouvrage, Aminata Traore est interviewée, par le journal français "20 minutes". Elle répond aux lieux communs répandu par les médias français.

 

 

 

 

 

Aminata Traoré : «Pourquoi devrions-nous dire merci à la France?»

 

  

Par Faustine Vincent, 9 janvier 2013

 

 

 

Vous êtes critique sur les interventions françaises au Mali et en Centrafrique. Pourquoi?

On ne résout pas par les armes des problèmes liés à la politique économique internationale menée depuis plus de trente ans en Afrique. Il faut revenir aux origines du problème: les institutions internationales de financement, auxquelles participe la France, n’ont pas développé l’Afrique mais l’ont au contraire fragilisée, secrétant le chômage et la pauvreté.

Parmi les terroristes il y a aussi des jeunes désespérés, sans avenir. On les retrouve parmi les djihadistes au Mali ou au sein de la Seleka.

Les points communs entre le Mali et la Centrafrique ce sont le profil des acteurs, les causes profondes de la déstabilisation et la militarisation.

 

 

Au Mali, les djihadistes menaçaient d'atteindre Bamako et terrorisaient la population, tandis qu’en Centrafrique les violences avaient pris une ampleur alarmante. Fallait-il ne pas intervenir malgré tout ?

Je ne veux pas me laisser enfermer dans ce questionnement car je n’aime pas commencer par la fin de l’histoire. Il faut se demander comment on en est arrivé là. La guerre en Libye menée par Nicolas Sarkozy a déstabilisé toute la région. Le Mali a été le premier pays à en faire les frais, à cause de la circulation des armes venant de Libye et la rébellion touareg.

 

 

En quoi ?

La France a fait un mauvais calcul : elle croyait que les touaregs d’origine malienne, qu’elle a soutenus, se battraient contre al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), qui est une menace pour la France. Or les rebelles se sont alliés aux djihadistes, et ont eu raison de l’armée malienne. La France est donc intervenue pour réparer les dommages qu’elle avait causés, et nous devrions dire merci? Si on n’explique pas aux gens les origines du problème, on devient redevable à la France de nous avoir libérés alors qu’on était victime.

 

 

François Hollande, qui a décidé d’intervenir, a hérité de cette situation… 

Sarkozy a eu sa guerre en Libye, fallait-il que la gauche ait la sienne? François Hollande aurait pu faire autrement, sans déployer l’armada. Il avait dit qu’il n’enverrait pas de troupes au sol, ce qu’il n’a pas respecté. Je suis militante de gauche. Quand François Hollande est arrivé je me suis dit qu’il y aurait un dialogue. Mais il n’y a aucune volonté d’écouter l’Afrique. Les officiels et les ONG sont écoutés, certes, mais pas les voix dissonantes comme la mienne.

 

 

Quelles conséquences a selon vous l’intervention au Mali?

Au début l’opération a été saluée. Les terroristes ne sévissent plus à Gao, Kidal et Tombouctou. Mais ils se sont dispersés. On a connu des attentats après l’opération Serval : peut-on dire que le pays a été sécurisé ?

 

 

Vous mettez en doute les motifs de l’intervention française au Mali et en Centrafrique…

On nous prend pour des idiots: on nous dit «on va vous protéger» alors que la France est là simplement pour ses intérêts. Derrière l’humanitaire, c’est une guerre de positionnement pour défendre des intérêts géopolitiques – contre le terrorisme-, mais aussi pétroliers et miniers –le Mali et la Centrafrique ont des ressources naturelles convoitées.

 

 

La France souhaite que les Africains puissent assurer leur sécurité par eux-mêmes, et va par ailleurs réduire ses effectifs au Mali. Vous vous en réjouissez?

Ce n’est pas mon souci. Le plus important c’est d’expliquer, et que la France respecte les Africains. Il ne faut pas faire de l’Afrique une planète à part.

Source: 20minutes.fr

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