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Publié par Saoudi Abdelaziz

Par Philippe Escande, 20 mai 2022

Wall Street plonge vers les abîmes, la guerre fait rage en Europe, la Chine menace, mais Joe Biden a un autre sujet de préoccupation majeur : la protection des nourrissons.

Depuis plus de trois mois, l’Amérique fait face à une pénurie de plus en plus criante de lait infantile. Si les étiquettes s’envolent sur les rayons fruits et légumes de Walmart, ceux de lait pour bébé sont désespérément vides.

Une catastrophe pour toutes les mamans qui n’allaitent pas leur nouveau­né, contraintes de chercher sur Internet des recettes de mélanges aléatoires et parfois dangereux, selon les pédiatres, pour nourrir leur progéniture.

Aussi, face à cette situation qui évoque les supermarchés moscovites de l’époque soviétique, le président des Etats­Unis a­t­il abandonné un temps ses livraisons d’armes à l’Ukraine pour gagner la guerre du lait en poudre. Il a pour cela exhumé un vieux décret datant du rideau de fer, le Defense Production Act, afin de lancer l’opération « Fly Formula » : un pont aérien destiné à accélérer les importations de lait infantile en provenance essentiellement d’Europe.

Grippage de la machine logistique

Cette crise est née de la double pénurie de matières premières et de main ­d’œuvre. Ce n’est pas très original en ce moment, puisque cette situation est la première raison de l’inflation des prix qui pourrait plonger l’Amérique dans la récession.

Mais dans le cas du lait infantile, ce grippage de la machine logistique s’est doublé d’un gros pépin administratif. A la suite du décès de deux nourrissons, en février, l’administration américaine, soupçonnant le lait maternisé fabriqué par le géant du secteur Abbott, a ordonné la fermeture de son usine de Sturgis (Michigan). Depuis, les ruptures de stock se sont amoncelées. Les griefs ont été levés, mais d’autres soucis de conformité bloquent la reprise.

Comment se fait­-il que l’arrêt d’une seule usine puisse provoquer une telle catastrophe ?

Parce que la production de lait maternisé est très concentrée et très nationale. Trois producteurs – Abbott, Gerber (filiale de Nestlé) et Reckitt – détiennent 95 % du marché et la production est à 98 % nationale. A l’heure où concurrence et mondialisation deviennent des gros mots et où beaucoup rêvent de relocalisation industrielle, Joe Biden se trouve forcé d’écrire à ses ministres de la santé et de l’agriculture pour leur demander « de prendre toutes les mesures possibles pour importer davantage de lait pour bébé ».

La sécurité logistique, alimentaire ou sanitaire ne s’accorde finalement pas si bien que cela d’un monde fermé, contrôlé par quelques oligopoles.

Source : (PERTES & PROFITS) Le Monde.fr

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