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Publié par Saoudi Abdelaziz

Extradé, fin mars dernier depuis l’Espagne, l’ancien militaire Mohamed Azzouz Benhalima, notamment accusé par la justice «d’appartenance à un groupe terroriste», en l’occurrence «Rachad», a comparu hier au Tribunal de Sidi M’hamed, face aux juges de la section chargée de la «lutte antiterroriste et du crime organisé transfrontalier».

L’audition de Mohamed Benhalima intervient quelques jours après la diffusion, par les services de police, des aveux de l’accusé, impliquant le mouvement Rachad, classée "organisation terroriste".

En plus de ces aveux Cousu main, les juges instruisent cette affaire dans un contexte particulier défini le même jour par El Djeich, l’organe de l’ANP : « Après avoir fait échec à de précédentes tentatives de saper les fondements de l’Etat algérien et ses institutions constitutionnelles, le peuple algérien découvre les détails d’un autre complot ourdi contre notre pays depuis l’étranger et orchestré par une organisation terroriste dont les têtes pensantes ont recours à de viles méthodes et lancent des campagnes hostiles traduisant une profonde rancœur envers l’Algérie et son peuple et les acquis réalisés dans nombre de domaines, en un temps record, dans le cadre de la nouvelle orientation adoptée ».

Après la diffusion par la police de la vidéo des aveux de Benhalima, le site Rachad.org avait publié ce communiqué

De la mise en scène des « aveux » accommodants de Benhalima

Par Youcef Bedjaoui et Younes Benmoussa

1er avril 2022

Confessions, excuses : pourquoi cette soif d’abaissement ? Un silence tombe. Ils tournent autour de lui comme des chasseurs qui ont coincé une bête étrange et ne savent pas comment l’achever.

Dimanche dernier, le 27 mars 2022, la Direction générale de la Sureté nationale (DGSN) a publié une vidéo confession du lanceur d’alerte Benhalima Mohamed Azzouz (BMA) qui a été diffusée sur la télévision nationale à l’heure du pic d’écoute (20 h) ainsi que sur les comptes Facebook, Twitter et YouTube et de la DGSN. Quelques heures auparavant, ces comptes ainsi que quelques titres de la presse en ligne avaient lancé des alertes annonçant l’imminence de la diffusion de « graves aveux » de BMA. Après la diffusion de la vidéo, l’APS titrait « Aveux du détenu Benhalima: l’organisation « Rachad » impliquée dans des plans ciblant la stabilité de l’Algérie » alors que TSA, par exemple, annonçait que « Extradé d’Espagne, l’ex militaire Mohamed Benhalima passe aux aveux », tandis que les titres principaux de la presse arabophone soulignaient le caractère « choquant » ou « dangereux » des « aveux » de BMA.

S’agit-il vraiment d’aveux, comme le rabâchent les médias inféodés aux moukhabarat  (DGSI)? Les déclarations filmées de BMA sont-elles volontaires ou a-t-on visionné la vidéo d’un otage faisant des confessions accommodantes sous la contrainte ?

Le recours à la confession spectacle est une vieille addiction de la justice aux ordres dans notre pays, comme ailleurs dans plusieurs régimes totalitaires ou dictatoriaux (Chine, Russie, Corée du Nord et Syrie par exemple). Que nous apprennent les outils analytiques de ces mises en scène de la repentance sur la dernière vidéo de la DGSN ? Quelles sont les audiences ciblées par la spectacularisation et la médiatisation de ladite confession de BMA, et quels messages politiques leurs sont destinés ? En quoi le simulacre d’aveux de BMA impacte-t-il les procédures judiciaires le concernant ?(…)

Le site de Rachad après avoir proposé une analyse approfondie de la vidéo des aveux, conclut :

La vidéo de Benhalima au regard du droit international ratifié par l’Algérie

Etant donné que le contenu de la vidéo est essentiellement politique, on est en droit de conclure que les interrogateurs de BMA et les scénaristes de la vidéo n’étaient pas des officiers de police judiciaire, procédant à une enquête préliminaire régulière, mais des barbouzes de la DGSI. Le logo de la DGSN apposé sur la vidéo ne trompe personne. Les « aveux » filmés qui y sont soutirés et leur diffusion l’ont été hors d’un cadre légal.

BMA a été contraint à tenir les propos qui y sont enregistrés. Or le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par l’Algérie, stipule dans son article 14, 3g, que toute personne ne doit pas « être forcée de témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable ».

Par ailleurs, la diffusion publique d’aveux avant un procès réduit ce dernier à une simple formalité. Après qu’un suspect ait fait des aveux à la télévision publique, quel procureur aura la témérité de ne pas l’accuser, quel juge s’aventurera à ne pas le condamner, même s’il rétracte ses aveux ensuite ? Ceci compromet gravement le droit à un procès équitable inscrit dans le même pacte, article 14, 1, qui déclare que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera[…] du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »

D’autre part, les barbouzes de la DGSI ont violé les principes du droit international qui protège les lanceurs d’alerte. L’article 19, 2, du même pacte énonce que « toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix. » En outre, l’Algérie a ratifié en 2004 la Convention des Nations Unies contre la corruption, qui inclut dans son article 33 des dispositions relatives à la protection des personnes signalant la corruption.

Texte intégral : Rachad.org

 

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