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Publié par Saoudi Abdelaziz

La centrale solaire de l’entreprise publique Sonatrach à Bir Rebaa, dans le sud-est de l’Algérie, en novembre 2018. Photo DR

La centrale solaire de l’entreprise publique Sonatrach à Bir Rebaa, dans le sud-est de l’Algérie, en novembre 2018. Photo DR

9 décembre 2021. Le Monde.fr

Par Safia Ayache (Alger, correspondance).

L’Algérie va-t-elle amorcer sa transition énergétique à marche forcée ? Le 21 novembre, le président Abdelmadjid Tebboune a fixé à trois mois, pas un de plus, le délai accordé « aux établissements et aux structures de l’Etat » pour passer à l’énergie solaire. Les communes devront elles aussi sauter le pas pour l’éclairage public, y compris dans les zones montagneuses et isolées.

Avec 3 000 heures d’ensoleillement annuel moyen, la ressource ne manque pas. Seulement, elle n’est pas ou très peu exploitée : l’Algérie continue de produire 99 % de son électricité à partir du gaz tiré de ses sols. Une énergie fossile de plus en plus sollicitée pour satisfaire la demande intérieure, la consommation en énergie ayant bondi de 60 % entre 2011 et 2020, selon Noureddine Yassa, président du Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique (Cerefe).

Pour pouvoir continuer à exporter sa production – les hydrocarbures (gaz naturel et pétrole brut) représentaient 91 % des exportations en 2020 et constituent toujours les principales recettes en devises du pays –, les autorités ont appelé à « rationaliser la consommation locale du gaz ». Mais l’alternative solaire est-elle viable ?

« Gaspillage »

L’Algérie, qui s’est dotée d’un programme national des énergies renouvelables (ENR) en 2011, reste loin de ses objectifs. « Le gaspillage menace la durée de vie des réserves d’énergies fossiles restantes et c’est certainement la prise de conscience de cette situation qui impose la nécessité d’accélérer la transition énergétique. Mais le programme national pour l’échéance 2030 prévoyait 22 000 mégawatts de capacité en ENR [dont 10 000 MW destinés à l’export]. Le bilan, à savoir moins de 1 % des 22 000 MW envisagés, est trop faible », déplore Tewfik Hasni, ancien vice-président de Sonatrach, la compagnie algérienne des hydrocarbures.

Toutes sources confondues, les capacités installées en énergie renouvelable ne dépassent actuellement pas 500 MW. Pour concentrer les efforts, un ministère de la transition énergétique et des énergies renouvelables a vu le jour en juin 2020. Il est chargé de mener à bien le plan gouvernemental dont les objectifs ont été ramenés à 4 000 MW d’ici à 2024 et 15 000 MW à l’horizon 2035.

Un appel d’offres, retardé depuis plusieurs mois, devrait être lancé avant la fin de l’année dans le cadre d’un premier projet, le Solar 1000, qui verra la réalisation de centrales solaires photovoltaïques d’une capacité de 1 000 MW. Onze sites situés dans des wilayas du sud du pays, notamment à Ouargla, El Oued, Ghardaïa et Béchar, ont déjà été retenus.

A la recherche de financements, l’Algérie a également revu la règle 51/49, qui limitait les participations étrangères à 49 % du capital d’une société algérienne. Celle-ci ne concerne désormais plus les projets liés au renouvelable. « C’est une grande avancée », note Myriam Fournier Kacimi, la dirigeante de Sungy, un bureau d’étude et de développement de projet solaire installé en Algérie depuis 2014.

« Une alternative trop chère »

Partisane d’un meilleur accès au réseau électrique, d’une plus grande implication du secteur bancaire et d’une réforme des subventions, la cheffe d’entreprise est persuadée que « le marché va exploser ». « La normalisation et la professionnalisation de la filière devront suivre », pense-t-elle.

Un enthousiasme que ne partage pas complètement Mohammed Abdennacer Naili, fondateur de Shames Djazair, une société spécialisée dans la commercialisation et la distribution de produits photovoltaïques. « Pour les consommateurs, le solaire reste une alternative trop chère. L’une des solutions consiste à revoir la taxation pour baisser le coût des équipements », soutient ce jeune ingénieur de 23 ans, qui est convaincu que l’Algérie devrait se concentrer « sur le développement de centrales de petites et moyennes tailles » avant de viser des projets de grande envergure.

Aujourd’hui, la forte subvention des prix de l’électricité ne pousse pas les particuliers à se tourner vers les énergies propres, mais « on ne peut pas non plus augmenter brutalement les prix », souligne Mohammed Abdennacer Naili. Le Commissariat aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique plaide de son côté pour introduire « sans heurts des prix réels de l’électricité, en remplaçant les subventions généralisées de l’énergie électrique par des aides plus ciblées sur de petites installations d’autoconsommation pour les catégories les plus défavorisées ». Un basculement qui pourra difficilement se faire en trois mois.

Source : Le Monde

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