« Pas loin de la ligne Morice et tout près des seuils de pauvreté ».
UN MAÇON EST MORT
Par Slimane Laouari, 21 juin 2021
Ils ne doivent pas être nombreux, ceux qui connaissent Mechta-el-Fouara. Le nom ne vous dit rien et c’est normal. Les noms de lieux, de personnes, d’animaux ou de choses ne parlent pas, ceux des femmes et des hommes non plus, d’ailleurs. Surtout quand ils n’en ont pas les moyens.
Jamais un nom de bourgade ne s’est adressé à quelqu’un pour lui dire quoi que ce soit. Mais ça peut parler, quand c’est écouté. Qui écoute Mechta-el-Fouara ? On ne sait pas, c’est où, déjà ? C’est dans la commune de Morsott. Vous ne connaissez pas Morsott non plus ? C’est normal mais, « théoriquement » du moins, selon la hiérarchie administrative et institutionnelle du grand et beau pays qu’est l’Algérie, vous avez plus de chances de connaître Morsott qui est une commune que Mechta-el-Fouara qui n’est qu’une… mechta comme son nom l’indique sans avoir besoin de parler.
C’est quoi une mechta, déjà ? Ce n’est pas important, c’est un lieu où vivent des femmes et des hommes qui ont rarement choisi d’y habiter. Rarement mais pas jamais, parce que, paraît-il, toutes les mechtas ne sont pas des zones d’ombre. C’est quoi une zone d’ombre ? Ce n’est pas important, non pas parce que le mot est d’invention récente mais parce que le mot va disparaître dès que son utilité sera parvenue à sa date de péremption.
A Mechta-el-Fouara, dans la commune de Morsott, à quelques dizaines de kilomètres de Tébessa, un maçon est mort. Il a succombé à ses graves blessures causées par une chute du deuxième étage d’un immeuble où il bossait. Personne ne vous demandera si vous connaissez Tébessa, puisque vous connaissez forcément. C’est la ville dont Djemaï, l’innommable préposé au FLN, avait dit un jour que tout le monde était trabendiste sauf sa famille !
Il y a plein d’autres raisons de connaître et d’aimer Tébessa. Il n’y en a aucune qui nous empêcherait de parler de la mort d’un maçon. C’est important un maçon, ça construit des maisons, ça élève des enfants et ça travaille dur. Un maçon, ça bosse souvent au-delà de l’âge de la retraite, qui devrait être revu à la baisse d’ailleurs, tellement c’est pénible. Mais il y a pire : souvent, il n’y a pas d’âge de retraite parce qu’il n’y a pas de retraite ! Un maçon, ça travaille au noir dans de grandes proportions.
A Mechta-el-Fouara dans la commune de Morsott à 30 kilomètres de Tébessa comme ailleurs dans le vaste et beau pays qui est le nôtre, ça peut mourir à tout instant. Parce qu’à 62 ans, on n’a plus rien à faire sur un échafaudage, parce que l’échafaudage est fait de bric et de broc et parce que la mort d’un maçon, ça n’émeut pas grand monde. Surtout quand ça arrive dans une mechta, pas loin de la ligne Morice et tout près des seuils de pauvreté.
Source : Le Soir d’Algérie
POST SCRIPTUM
Morsott : Pénurie d’eau, insalubrité et autres désagréments
Par Samir Lakehal, 16 août 2020
Celui qui visite Morsott, une commune située à 35 km de Tébessa peut immédiatement constater dans quel état piteux vivent ses habitants.
Cette ville, située au nord de la wilaya, demeure parmi les communes où les aspects de la ruralisation sont visibles à l’œil nu, notamment au niveau des quartiers. Certains citoyens procèdent à l’élevage des animaux en milieu urbain à l’image de la cité du 1er Novembre 1954 et celle du 19 juin 1965.
Autre image de la dégradation de la ville, ces rues éventrées, notamment en période de pluies, où toute la ville se transforme en un véritable bourbier en raison de la dégradation du revêtement des chaussées, les rendant ainsi inaccessibles. Les routes de cette commune promue, rappelons-le, au rang des communes mixtes avec celles de Sétif et autres durant l’époque coloniale, sont devenues une source de stress pour la population locale. La ville offre, en effet, un décor indigne d’un chef-lieu de daïra.
Les sommes colossales déboursées pour son amélioration n’ont rien changé au grand dam des habitants. Mise à part la chaussée du tronçon de la RN16 qui traverse la ville, et qui est en bon état, aucun quartier de cette ville qui compte plus de 35 000 âmes n’échappe à la dégradation avancée des routes qui se trouvent dans un état lamentable.
Un réseau routier désastreux, accusant un déficit en matière d’entretien notamment celui des cités de Moustakabal, Hay Zhor, Sidi Abdallah et Géni. Les pénuries d’eau potable sont fréquentes, dans pratiquement tous les quartiers de la ville, notamment les cités Afak, Nahdha et Hay Zhor qui connaissent une situation sans précédent qui commence à peser sur le quotidien des habitants en cette période caniculaire. Le ramassage des ordures demeure un vrai casse-tête pour la mairie. L’insalubrité dans les quartiers de la ville est toujours omniprésente. Le travail accompli par la municipalité pour la collecte des déchets ménagers ne suffit pas pour endiguer toute l’insalubrité qui règne dans les quartiers et les lotissements.
Ces derniers se sont transformés en dépotoirs à ciel ouvert. En conclusion, la ville de Morsott, l’une des plus anciennes communes de la wilaya, se dégrade à une vitesse très rapide. La commune qui est aussi chef-lieu de daïra abritant deux communes, n’a pas eu sa part des projets structurants. Elle ne fonctionne qu’avec la subvention de l’État.
Source : El Watan