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Publié par Saoudi Abdelaziz

« Les travailleurs les plus exposés au Covid-19 ont aussi été les moins protégés par leur entreprise » titre un article de Iban Raïs parue dans Mediapart le 26 juin.  Ce constat résume la nouvelle étude du collectif Des chiffres et des luttes, collectif constitué de statisticiens employés à l’Insee, à la Dares et à la Drees (les grands instituts de statistiques publics) et soutenu par la CGT. 

EXTRAITS

L’étude révèle ainsi que certaines catégories socio-professionnelles ont été bien plus exposées aux risques de contamination que d’autres pendant la crise. Dans le détail, voici les situations critiques auxquelles ils ont pu être exposés : nécessité d’utiliser les transports en commun, gestes barrières impossibles à respecter, forte densité dans les locaux fréquentés et postes en contact avec le public. Mais le risque le plus souvent évoqué par les personnes interrogées est celui lié à la manipulation d’équipements potentiellement contaminés : 66 % des salariés ont affirmé avoir fait face à cette difficulté. Autre donnée édifiante : parmi les salariés contraints d’aller au travail, les employés et ouvriers ont été plus souvent que les cadres confrontés à l’impossibilité d’effectuer les gestes barrières (11 points d’écart entre ces catégories socio-professionnelles).

Selon l’étude, près de neuf employés interrogés sur dix révèlent ainsi que leur employeur ne leurs a pas proposé un moyen alternatif aux transports en commun pour se rendre sur leur lieu de travail. Un risque de plus, au quotidien, de contracter le virus. Si 86 % des travailleurs ont déclaré disposer de lave-mains et de gel hydroalcoolique de façon satisfaisante, « seulement 6 salarié·es sur 10 disposent au moment de l’enquête de masques et de gants en quantité suffisante ».

Même les travailleurs directement en contact avec des malades n’ont pas toujours été satisfaits des mesures prises pour les protéger : plus d’un soignant interrogé sur trois a indiqué n’avoir pu travailler dans des conditions sécurisées. « 31 % du personnel hospitalier déclare avoir manqué de masques en quantité suffisante, exposant ainsi l’ensemble du personnel, soignant et non soignant, à des risques particulièrement graves », note le collectif. L’étude donne la parole à la secrétaire médicale d’un hôpital. Son témoignage met au jour les graves manquements en dépit desquels elle a dû travailler chaque jour : « Sur site, nous ne sommes pas autorisés à porter des masques, même ceux que nous nous procurons par nos propres moyens, car ils manquent dans les services… Nous n’avons pas de gel hydroalcoolique, et nous avons dû apporter nos propres lingettes désinfectantes pour nos bureaux, téléphones… »

L’étude contient un autre enseignement à noter et qui concerne la différence de traitement entre les employés des grands groupes et ceux travaillant dans des TPE ou des PME : « Les salarié·es des TPE/PME sont moins bien protégé·es que ceux des établissements de taille importante : en effet, les salarié·es des TPE/PME sont six fois plus nombreux que celles et ceux des grandes entreprises (13 % contre 2 %) à ne pas disposer de mesures de protection. Au-delà du contexte Covid-19, ce résultat confirme la faiblesse des politiques de prévention adressées aux TPE/PME. »

Certaines professions n’ont tout simplement pas pu appliquer les gestes barrières, comme le regrette le collectif, dans un souci de productivité et d’efficacité. C’est le cas, par exemple, dans les abattoirs : « Le bruit à l’entour des machines entraîne la nécessité de retirer le masque pour communiquer avec les collègues. » Un salarié est cité : « Les agents qui contrôlent les viandes en abattoir ne sont pas ou peu protégés. Les mesures de protections sont risibles, si les conséquences ne risquaient pas d’être dramatiques. » De fait, de nombreux « clusters » ont été observés de par le monde dans ce secteur d’activité. Pour ces professions, les employeurs n’ont pas su s’adapter, estime le collectif, exposant leurs employés à des risques importants durant leurs journées de travail.

Les métiers dits « invisibles », qui englobent le nettoyage, le gardiennage ou encore l’entretien ménager, ont eux aussi particulièrement souffert pendant la crise : 35 % des personnes interrogées ont déclaré avoir manqué de masques et de gants, 40 % ont estimé que les mesures prises par leur employeur étaient insuffisantes et 11 % ont affirmé qu’elles ne bénéficiaient d’aucune mesure de protection.

Les contrats courts, et donc précaires par nature, comme les livreurs, sont 51 % à déclarer avoir manqué de masques et de gants. Dans le secteur de l’accueil et du secrétariat, des professions pourtant indispensables au bon fonctionnement des entreprises et très exposées, le pourcentage grimpe à 61 %.

Au bout du compte, ils sont 68 % à avouer ressentir une « boule au ventre » en allant au travail, un sentiment provoqué par la peur de la contamination. Le collectif conclut son étude en questionnant l’après-Covid : « On ne peut que s’interroger sur la manière dont, en temps normal, la santé des travailleur·ses est protégée. » Rappelons que l’article L 421-1 du code du travail oblige légalement l’employeur à assurer la sécurité de ses salariés : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »

Source : Mediapart

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