«Messhou fem el ji3an». Essuyer la bouche de celui qui a faim.
La Chronique du Condjador
Jijel, le 6 mars 2018
Le matin à leur rentrée au port, la rareté de la sardine et sa cherté ont transformé les marins-pêcheurs en collecteurs (glaneurs était le mot préféré du regretté da Mokhtar Zine) des sardines qui restent accrochées au filet de pêche, chose que les gens pauvres faisaient avant pour avoir leurs bouillabaisses sans demander l’aumône à personne.
Durant les année 2000, des Tunisiens et des Italiens se sont spécialisés dans l’achat de la langouste à 4000 dinars le kilo, au port de pêche Boudis de Jijel. Ils offraient aussi des kilomètre de filets trémail aux pêcheurs des "petit métiers" (palangriers), à condition que toute la langouste pêchée leur revienne à un prix fixe, sans passer par la vente aux enchères.
C'est ainsi que des quantités énormes de langoustes, jamais pêchées auparavant à jijel, ont été exportées vers la Tunisie et l'Italie, laissant derrière un grand massacre de la faune marine locale. La méthode consiste à laisser pourrir les poissons accrochés aux filets pour servir d'appât offrir aux langoustes. Des quantités énormes de poissons divers sont perdues pour le consommateur jijélien, qui n'a rien eu de cette langouste.
Au cours de l'année de 2017, des Tunisiens se sont branchés sur le poulpe, acheté aussi "directement" aux pêcheurs, au prix jusque-là inimaginable de 1300 dinars le kilos. Ce gastéropode était en effet la sadaka donnée gratuitement aux pauvres au retour des bateaux. C'était la moins noble des espèces ramenées par les palangriers et les chalutiers. Aujourd'hui, le poulpe est devenue introuvable, tout un arsenal de moyen matériels est utilisé pour sa pêche intensive. Le paysage du port est transformé, les murs de toutes les baraques de pêcheurs sont envahies par ces engins venus d’ailleurs...