Rien de moins musulman que le Halal Business
Par Yamine Boudemagh, 22 décembre 2016
EXTRAIT
Il y a 14 siècles, l’Islam a révolutionné le concept de religion en supprimant le clergé. Il venait tout simplement d’inventer la laïcité. Il faudra attendre le 12 Shawal 1323 (9 décembre 1905) pour voir en France s’installer une version de cette laïcité. Aujourd’hui, le ministre des cultes de la république laïque française, Bernard Cazeneuve, ne peut donc plus nommer les évêques en vertu de la loi de séparation des églises et de l’état. Par contre, il peut et il fait sommer les français de confession musulmane de s’inventer un clergé ; il décide du contenu de la formation des imams ; il impose la langue dans laquelle ces imams doivent prêcher, voire le contenu du prêche même. Tout cela, au nom de la laïcité évidemment !
Dans sa grande sagesse, Monsieur le Ministre des Cultes de la République laïque française ira-t-il pour autant jusqu’à réformer le bien peu islamique commerce halal qui sévit en France ?
(...) Pour comprendre le concept de حلال (halal), il faut avoir quelques notions de droit musulman. Entre le licite (حلال) et l’illicite (حرام), il existe quatre autres principes qui régissent les actes des musulmans :
L’obligatoire (واجب) : un acte dont l’accomplissement est obligatoire
Le recommandable (مستحب) : un acte qu’il est recommandé d’accomplir sans être obligatoire
L’acte sans incidence (مباح) : un acte neutre ni obligatoire, ni interdit et qui ne dépend que du jugement de chacun
Le réprouvé (مكروه) : un acte dont il est recommandé de s’abstenir bien qu’il ne soit pas interdit
De ces six principes complets du droit musulman, pourtant allègrement documentés, le marketing n’a retenu que celui du حلال (halal), et encore dans sa forme la plus élémentaire. Adepte du grand philosophe américain, Georges W. Bush, le marketing alimentaire classe les produits en deux engeances seulement : les produits حلال (halal) et… l’axe du mal. Le monde du marketing est un monde simple qui ne s’adressent qu’aux simples en esprit : Achetez mon produit, il est le meilleur, d’ailleurs il est halal. Et comme le Port Salut, c’est écrit dessus avec un logo que même le dernier des analphabètes en arabe peut lire : حلال
Bienheureux les simples en esprit du halal business ; mais le royaume des cieux leur appartient-il pour autant ? Rien n’est moins sûr.
Tout d’abord le mot حلال (halal), tel qu’il est vendu sur les produits estampillés comme tels, n’apparaît qu’une seule fois dans le Qur’an, dans le verset 116 de la seizième sourate. Et que dit ce verset ? Justement de ne pas utiliser ce logo : « Ne dites pas « ceci est halal, cela est haram », selon que vos langues soient portées au mensonge ; vous imputeriez un mensonge à Dieu et ceux qui imputent un mensonge à Dieu sont voués à l’échec »
و لا تقولوا لما تصف السنتكم الكذب هذَا حلال و هذا حرام لتفتروا على الله الكذب ان الذين يفترون على الله الكذب لا يفلحون
Il faut comprendre qu’historiquement, l’Islam s’inscrit dans une logique libertaire. La règle originelle en Islam est la permission. L’interdiction est l’exception et la nécessité lève l’interdiction. Et de toutes façons, l’interdiction, qui est une intrusion dans le libre arbitre décrété de l’homme, ne peut être ordonnée que par un décret divin.
Le mot حلال (halal) apparaît dans le Qur’an sous d’autres formes ;
Cinq fois sous la forme de l’attribut à l’accusatif حلالا (halalan) : 2-168, 5-88, 8-69, 10-59, 16-114. Chaque fois, il s’agit non pas d’interdire mais d’encourager l’homme à jouir de toutes les bonnes nourritures terrestres. Le verset 59 de la dixième sourate est on ne peut plus clair à ce propos : « Dis « Voyez-vous ce que Dieu a créé comme nourriture pour vous afin que vous puissiez survivre ? Et pourtant vous avez déclaré ces nourritures licites et illicites ». Dis « Est-ce Dieu qui vous l’a commandé ? Ou bien le mettez-vous mensongèrement sur son compte ?
قل ارء يتم ما انزل الله لكم من رزق فجعلتم منه حرام و حلال قل ءالله اذن لكم ام على الله تفترون
De nombreuses autres fois sous une forme passive, comme احل (ouhillou) par exemple. Car ce qui est permis ne peut l’être que par une autorité dûment mandatée. Il ne suffit pas de dire « vous est permis », encore faut-il préciser par qui ! Or, en Islam, c’est simple, il n’existe qu’une seule autorité. En dehors de Dieu, personne n’a l’autorité pour décréter une nourriture licite ou illicite. Inventeur du concept de laïcité, l’Islam ne permet aucun clergé.
Incapables de résister aux sirènes des répercussions financières de ce halal business, les adorateurs du veau d’or se sont érigés en autant d’institutions ayant autorité pour décréter le licite et donc l’illicite. Non seulement ils se sont rendus coupables du pire des vices en Islam, l’Associationnisme, mais ils le font souvent pour de viles raisons pécuniaires au service de ceux qui ne sont pas vraiment les amis de l’Islam.(...)