L'Algérie a besoin de règles (5 ans après)
Article de Saoudi Abdelaziz, publié le 14 avril 2011, deux jours après la création du blog
« Vers un sursaut populaire », c’est le titre de l’article que j’avais publié dans l’hebdomadaire Algérie Actualité n°1476 de la semaine du 25 au 31 janvier 1994 au moment où une nouvelle escalade de la violence s’amorçait. Ma contribution s’achevait ainsi :
« Le problème actuel de notre pays, historiquement bien délimité, c’est que plusieurs raisons empêchent l’opinion publique de s’exprimer et d’émerger, d’occuper l’espace politique. C’est cela qui fait que l’on s’enlise, que les issues ne s’ouvrent pas. Le système actuel et la stratégie de la tension qu’il sécrète « naturellement » tient le peuple en otage. Va-t-il réagir puissamment pour se libérer du carcan dans lequel l’enferme cette stratégie ? L’escalade de la violence n’est pas, à mon avis, le résultat de la fuite en avant de groupes terroristes « autonomes ». Il y a une ligne systématique dans cette orientation nouvelle donnée à l’action terroriste. (...) Pour qu’une constitution garantisse vraiment la souveraineté populaire, il faut qu’elle soit âprement, longuement, discutée par la population. Aucune constitution octroyée n’a jamais garanti la souveraineté populaire. Le pouvoir prévoira des clauses pour se prémunir. Le signe que cette stratégie a échoué, que l’on s’engage dans la rupture avec l’ancien régime, l’ancien paysage politique dont le terrorisme est une des composantes essentielle, ce sont des centaines de milliers d’Algériens dans la rue et en grève, toutes catégories sociales confondues. C’est cet immense sursaut qui peut faire basculer les choses, ouvrir la voie à une réflexion nationale « positive », « constructive ».
Gouvernance a-constitutionnelle
Une année auparavant, dans un entretien accordée en janvier 1993 au Quotidien l’Opinion, dirigé par le regretté Bachir Rezzoug, j’essayais de cerner la forme particulière de pouvoir qui a émergé en Algérie depuis l’arrivée de Chadli Bendjedid à la présidence. On peut lire :
"Ce que Saoudi appelle « le césarisme présidentiel » marque entre Boumediene et Chadli « une différence de nature politique de l’institution présidentielle. Le propre du césarisme c’est d’être a-constitutionnel, c’est de recourir à des formes de pouvoir, à des mécanismes de pouvoir politique qui ne peuvent décemment être codifiés. Le césarisme présidentiel à la Chadli, c’est un enchevêtrement dans un complexe d’éléments a-constitutionnels qui sont, d’abord, l’utilisation des services de sécurité, leur prééminence dans l’élaboration de la décision et dans son application, les interférences claniques régionalistes, c'est-à-dire les réseaux d’influence et la perversion mafieuse. Tout cela est imbriqué. Ce sont des méthodes obliques qui traversent les institutions ».