Electrices courtisées, étudiants en colère, gros doute du banquier
Le 8 mars est devenu une routine politico-médiatique. Cette année pourtant, la commération semble un peu différente.
A une année des élections legislatives, les partis courtisent les électrices et essaient d'adapter leur offres politiques à l'électorat féminin, car la concurrence sera de plus en plus rude. D'autant plus que les aménagements au cours des trois prochaines années dans le "système de gouvernance" aboutiront probablement à l'accroissement du poids spécifique des partis dans les processus de décision.
"Pourquoi les militantes n'aiment pas le 8 mars et la "journée de femme" titre ce matin la remarquable chronique de Mohamed Saadoune sur le HuffPost. Extraits:
"Dommage que le 8 mars ne tombe pas un vendredi cette année, cela nous aurait évité une forte "présence alibi" sur l'espace public ce jour-là. Et peut-être aussi, les poncifs des politiciens. Le propos est d'une militante qui "franchement" n'aime pas les célébrations "hypocrites" liées à cette "journée de la femme"(...).
"Mais cette journée est tout de même utile car elle permet de rappeler quelques vérités, surtout dans un pays où le parlement s'est donné une très longue période de "réflexion" avant d'adopter de modestes articles - à l'effet problématique - destinés à prévenir les violences faites aux femmes. Cette longue hésitation d'un parlement à la représentativité contestable en dit long sur une stagnation régressive où le déni de citoyenneté affecte l'ensemble de Algériens mais les algériennes encore davantage (...)
Paroles d'étudiants en vrac
Recueillies par Kamel Boudjadi du journal L'Expression sur les campus de l'Université Mouloud Mammeri, où la colère gronde.
«Nous ne sommes plus fiers de nous présenter comme des étudiants. Notre image dans la société en a pris un sérieux coup»
«Comme vous voyez, nous sommes réduits à quémander un sandwich. Des grèves pour la bouffe. C'est vraiment grave
«C'est archi-faux de croire que les étudiants de l'université de Tizi Ouzou se reconnaissent dans les partis et les mouvements politiques. Regardez le nombre d'étudiants qui répondent aux appels aux marches de ces derniers. Ils n'arrivent même pas à mobiliser un millier sur les 42.000. Et si ces partis appellent cela, mobiliser, alors ils se trompent"
«Personne ne cherche nos intérêts. Ils courent tous derrière les leurs, y compris nos enseignants et l'administration. Les étudiants sont seuls face aux difficultés»,
«Nos gouvernants doivent donner un rêve aux Algériens. C'est la seule façon de les motiver. Un défi, un grand défi à réaliser. Nous voulons un rêve et un défi pour nous mettre à l'épreuve et faire voir au monde ce dont les Algériens sont capables», «Un rêve avec des étudiants nourris aux pâtes et spaghettis tous les jours? T'es fou.»
«Vous savez, vous les journalistes, il faut que vous fassiez aussi l'effort d'élever le niveau. L'université n'est pas uniquement une scène politique, un resto et des syndicats bidon. L'étudiant, c'est aussi des idées nouvelles, de l'exploration de l'inconnu dans tous les domaines»,
«Non, à Tizi Ouzou, l'étudiant, c'est la bouffe. L'étudiant à Tizi, c'est la course au visa. Vous savez que la bourse que l'Algérie nous donne sert pour beaucoup à payer les frais de visa?».
«Oui, c'est dommage de partir soigner les parents des Européens après des études payées par le sang de nos martyrs et la sueur de nos propres parents. Nous en sommes conscients. Mais c'est impossible d'évoluer dans notre pays. Les conditions ne s'y prêtent pas»
«Moi, mon père dit que nous ne méritons pas les pâtes qu'on nous donne au resto. Il dit que nous sommes des ingrats à qui l'Algérie ne doit rien donner même pas des sandwichs. Il se met en colère contre moi rien qu'en évoquant ce chapitre à la maison.»
«Moi, personnellement, j'en ai marre que l'on parle à ma place. Personne ne me représente. Je ne me retrouve avec aucun parti ni organisation ni association. Ils n'expriment qu'une partie de mes espoirs».
«Je peux défier tous les partis politiques s'ils peuvent réunir plusieurs milliers d'étudiants. C'est impossible. Et ce n'est pas parce que nous ne sommes plus à la page mais c'est plutôt eux qui ne le sont plus»
"Le plus gros doute" du banquier
"L'ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, Badreddine Nouioua, estime que ce n’est pas la dette qui pose problème, mais bien l’usage à faire des ressources collectées". Ces propos sont rapportés par Roumadi Melissa dans El Watan qui poursuit: "Et c’est sur ce point-là que réside le plus gros des doutes. Il estime qu’emprunter pour poursuivre dans des politiques stériles qui ont fini, au cours des dernières décennies, par détruire le tissu économique national et aggraver la dépendance de l’Algérie aux importations serait extrêmement grave et mènerait l’Algérie «droit dans le mur». Il estime que si l’on doit aujourd’hui s’endetter, que ce soit en interne ou en externe, c’est pour initier une véritable politique d’investissement qui implique aussi bien les secteurs public que privé. Il pense aussi que ce n’est pas «l’équipe actuelle qui est susceptible de mener ce genre de réformes, elle qui a échoué à les mettre en place du temps de l’aisance financière».
L’ex-gouverneur de la Banque d’Algérie met aussi en doute l’attractivité de l’emprunt. Il estime que la rémunération de 5% est certes plus élevée que les taux d’intérêt proposés par les banques, mais reste insuffisante pour attirer les détenteurs de fonds. Il estime que la majorité d’entre eux — qui gravitent dans l’informel pour une bonne partie — trouve plus d’intérêt à investir leurs fonds dans l’achat de devises, dans le commerce extérieur ou dans le commerce de gros. M. Nouioua pose aussi la problématique de la confiance et de la rupture entre ces acteurs de l’informel et les institutions de l’Etat.
Il pense enfin que pour servir à quelque chose, cet emprunt ne devrait en aucun cas être ouvert aux institutions publiques (banques, assurances…), auquel cas cela se traduirait par une réduction des dépôts bancaires et leur transfert vers la dette."