Après l'éviction de l'inamovible chef du DRS, les bouches vont-elles s'ouvrir?
C'est un jeune chauffeur tunisien qui m'a appris la nouvelle, lundi dernier, à Nabeul en Tunisie, où je finissais d'oublier la pesante lassitude de l'actualité politique algérienne. Reprenant du service, j'ai passé en revue les analyses et commentaires après départ du général Tewfik, l'événement-2015
EXTRAITS.
Après le départ de Tewfik "Il n'y a plus personne", affirme un des principaux acteurs de la décennie noire. Le général à la retraite Hocine Benhadid, classé éradicateur par les médias, estime que la voie est libre désormais pour l'accession au pouvoir de son ennemi-juré, Saïd Bouteflika, le frère-conseiller du président actuel. Fait assez rare, cet ancien chef de région militaire brise l'omerta en donnant son témoignage sur le processus de décision dans la hiérarchie militaire, durant les trois décennie écoulées.
Le général Abdelaziz Medjahed, ancien commandant de l'académie militaire de Cherchell reste dans la réserve et se démarque de l'analyse de son confrère retraité : “la culture de la retraite n’est pas encore rentrée dans nos têtes”. “Et qui dit qu’il n’a pas lui-même sollicité le Président pour lui accorder le temps de s’occuper de sa santé ?” s’est-il demandé. Le général Medjahed considère qu’il a accompli sa mission. Et de conclure avec cette sentence : “Un patriote se doit de déployer tous ses efforts pour le renforcement de cette institution. Parce qu’il s’agit de la sécurité de l’État.”
Au contraire, Daho Ould Kablia, l'ancien ministre de l'Intérieur de Bouteflika et porte parole des anciens du Malg (de qui descend le DRS) n'hésite pas à sortir sa réserve. Il affirme à propos de du président : "Même malade, il est suffisamment conscient de son statut pour ne pas se laisser dicter ses choix. Le seul problème, c’est qu’il délivre ses choix à dose homéopathique en s’appuyant sur la conjoncture. Ce qui n’est pas rassurant pour le peuple qui veut savoir clairement où va son pays". Et Il enfonce le coin : " À la moindre rupture d’équilibre, tout peut basculer et le pays être entraîné vers l’irréparable".
Tous reste à faire
Le professeur politologue Mohammed Hachemaoui, estime que ce départ forcé est une manœuvre orchestrée par les services eux-mêmes afin de faire croire à leur disparition. « Il s’agit de donner l’illusion que ce n’est plus le département du renseignement qui gouverne », estime Mohammed Hachemaoui, chercheur à l’Iremam-CNRS qui observe : "Les médias répètent en cœur le même récit: le limogeage du général Toufik par le clan Bouteflika marque la chute du mythe. Il n’en est rien".
Pour le blogueur proche du FFS Aït Benali Boubekeur "le limogeage du général Toufik -l'homme qui a plombé la vie politique pendant un quart de siècle -ne change rien à la donne. À moins que le clan présidentiel décide de restituer le pouvoir au peuple. Hélas, cette hypothèse est peu probable. Du coup, tout reste à faire".
"Toufik s'en va, le Général Soupçon est toujours au pouvoir" titre l'éditorialiste Saïd Djaafer qui s'interroge. Que faire? "Le pire n'est jamais sûr. Mais pour éviter que l'avenir ne se décide en cercle restreint, entre «clans », il nous faudra nous mêler de ce qui nous concerne, à s'écouter sans le filtre des étiquettes faciles et du procès d'intention permanent. Il faudra trouver le moyen de recréer un intérêt citoyen pour la politique. Réapprendre à militer en songeant à ceux qui dans l'adversité la plus totale ont été les grands acteurs du mouvement national algérien. Cela n'a rien d'une promenade. Mais les Algériens vont devoir inventer - les Tunisiens l'ont fait avec beaucoup de réussite - pour aider ce nouveau qui tarde à naître à voir le jour et à empêcher les monstres de surgir. Ils devront d'abord vaincre le général soupçon qui a été planté dans les têtes. Et c'est bien le plus dur à faire..."
Les bouches vont-elles s'ouvrir?
Air du temps? Après l'éviction de Tewfik, nous viennent de la nomenklatura des témoignages-révélations révélations, plus ou moins inspirés, sur le fonctionnement du pouvoir central. Une première également, Slim Othmani, un grand patron industriel médiatisé rompt avec l'omerta économique et dénonce: "des entreprises renommées ne déclarent pas leurs travailleurs à la sécurité sociale ». A suivre...