Madani Mezrag et le marronnier du mois d'août
Un marronnier en journalisme est un article ou un reportage d'information de faible importance meublant une période creuse, consacré à un événement récurrent et prévisible. Les sujets « débattus » dans un marronnier sont souvent simplistes. Son équivalent anglophone est le terme chestnut, (chataîgne), ou evergreen (à feuilles persistante) (source: wikipedia).
Certains observateurs de la scène politique algérienne le disent : l'ancien chef de l'AIS, devenu homme d'affaires, fait partie du dispositif de gestion politique du système. Lorsque le 15 août 2014, il y a exactement un an, Madani Mezrag organise son université d'été, c'est le journal à grand tirage El Khabar qui assure la communication sur l'événement. On lui fournit une large gamme de photos, ainsi qu'une vidéo et l'interview exclusive qui va avec. La synchronisation fut bien assurée. Dès le lendemain, les journaux indépendants et autres sites en mal de scoops s'emparent de la matière fournie par El Khabar. Les éditorialistes éradicateurs fulminent comme il était attendu d'eux.
Surtout que la réunion s'est tenue dans "les montagnes de Jijel" titrent les médias. De quoi donner le frisson, car nul n'ignore le caractère impénétrable de la montagne des Babors et de ses forêts, là où l'AIS avait élu domicile pendant la décennie noire, jusqu'à l'accord signé entre Madani Mezrag et le DRS en l'an 2000.
En fait, l'université d'été ne s'est pas tenue dans les redoutables Babors, mais en piemont tout près de la mer, dans la commune de Tassoust, célèbre pour ses plages et qui abrite la nouvelle université, avec non loin l'important port de Djendjen (où le commerçant Madani a ses entrées).
Madani Mezrag expliquait alors à El Khabar : "L'université d'été a été organisée sans autorisation légale, mais toutes les institutions de l'Etat y compris l'armée étaient au courant".Comme il le précisera lui-même quatre mois plus tard sur la chaîne Echourouk-tv : "Nous avons un accord avec le pouvoir qui est supérieur à la loi".
Bis répétita en 2015. L'opération "université d'été" est reprise avec trois jours d'avance, le 13 août. Elle ne s'est pas tenue dans la dangereuse "montagne" de Jijel, mais les titres se rabattent sur la "forêt", située dans la paisible ville côtière de Mostaganem, à l'ouest du pays.
Les lecteurs d'El Watan, Algérie patriotique et Le soir d'Algérie ont eu leurs éditos éradicateurs. Avec un peu de retard, Liberté titre ce matin: "Il revendique le haut patronage de l’Institution pour ses activités. L’ANP a-t-elle promis un rôle politique à Madani Mezrag ?". Bof. Dans le même journal, Dilem qui poursuit son combat contre les "terros" et autres "tangos", titre son dessin : "Madani Mezrak réunit ses troupes à Mostaganem".
En résumé, chacun a bien joué le rôle qui était attendu de lui par les maîtres de cérémonie.
A l'année prochaine à la même date pour le marronnier.