ENERGIE. le choix stratégique dangereux du conseil des ministres
Le gouvernement algérien a mis hier le doigt dans l'engrenage, en prenant la décision attendue par le lobby pétrolier international. Le Conseil des ministres a donné "son accord pour l’exercice des activités relatives à l’exploitation des formations géologiques argileuses et ou schisteuses". (communiqué du conseil des ministres).
La décison a été prise de faire appel aux entreprises intéressées. Le communiqué précise : "Les premières indications disponibles laissent entrevoir des capacités nationales appréciables en gaz et huile de schiste, ainsi que des perspectives prometteuses en terme de quantités récupérables. Cependant, pour confirmer le potentiel commercial de ces ressources, un programme minimum de 11 puits, étalés sur 7 à 13 ans, est nécessaire".
Riyad Hamadi annonce dans TSA: "Les bassins sélectionnés sont situés essentiellement dans des zones parfois à forte densité de population, comme Timimoun et Tindouf, et où les ressources hydriques sont rares et précieuses. Des zones également à caractère touristique et abritant des zones naturelles protégées ou à conserver".
Avant cette décision, l'universitaire spécialiste en énergie, Amor Khelif mettait en garde, il y une semaine de manière prémonitoire : « l’Algérie risque de devenir un banc d’essai pour les compagnies européennes et américaines qui vont venir faire des expériences dans notre pays. On nous pousse à financer des expériences industrielles nouvelles, indépendamment de leurs rentrées économiques et de leurs conséquences environnementales ».
Lu dans Wikipedia: "Des études du cabinet AT Kearney et de Bloomberg New Energy Finance (BNEF) montrent que de nombreux facteurs interdisent d'extrapoler le succès du gaz de schiste aux États-Unis au reste du monde. Il existe des incertitudes sur la rentabilité de leur exploitation sur d'autres zones géographiques, d'autant que dans le même temps, la forte production aux États-Unis, liée à une demande de gaz moindre a fait chuter le cours du gaz. Evoquant le "modèle spéculatif" qui anime les investisseurs américains, Wikipedia poursuit : "Les règles fiscales américaines permettent d'amortir l'investissement en totalité dès la première année, ce qui permet de le rentabiliser très rapidement, après quoi on fore de nouveaux puits, et ainsi de suite."
Que va-t-il se passer en Algérie après "ces 11 puits, étalés sur 7 à 13 ans"? Amor Khelif appelle à faire le bon choix stratégique: « C’est d’abord une question d’allocation des ressources. On ne peut pas tout faire en même temps. On ne peut pas développer à la fois les gisements conventionnels, le gaz de schiste et investir dans les énergies renouvelables. Tout cela a un coût et demande des ressources financières considérables ». Un choix politique fort qui impose de « se soustraire aux pressions qui cherchent à imposer des investissements dans les productions immédiatement exportables et qui passe par la décision de consacrer 40% des investissements réalisés dans le secteur au renouvelable ».
Dans la presse quotidienne ce matin, la décision du conseil des ministre semble être passée comme un lettre à la poste. Après un tour d'horizon sommaire, j'ai relevé un seul commentaire, celui de Madjid Makedhi qui conclut ainsi son article dans El Watan: "L’exploitation de cette énergie non conventionnelle a, rappelons-le, suscité un débat houleux en Algérie. De nombreuses organisations et des partis politiques se sont opposés à cette option qui présente, selon eux, des risques majeurs sur l’environnement et sur les nappes phréatiques dans le sud du pays".