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Publié par Saoudi Abdelaziz

Béjaïa, mai 2012, devant Cevital. Soutien aux grévistes de la faim. Photo DR

Béjaïa, mai 2012, devant Cevital. Soutien aux grévistes de la faim. Photo DR

EVOCATION

Par Saoudi Abdelaziz, 14 mai 2016

L'année 2011 fut très fructueuse pour Cevital-Agro. Des chiffres circulaient dans le complexe de Béjaïa où plus de 4000 salariés trimaient dans les raffineries de sucre, d'huile et à la margarinerie. Pour remercier le personnel pour sa performance, la famille Rebrab distribue des primes substantielles... aux cadres dirigeants de l’entreprise. Les ouvriers, les employés et les cadres subalterne doivent se contenter de miettes.

Dans un contexte de bas salaires, cette injustice supplémentaire fut le facteur déclenchant de la grève engagée le 18 janvier 2012. Elle fut massive, et mit la conglomérat des Rebrab sous les projecteurs de l'actualité.

Issaad Rebrab endort...

Le milliardaire descend alors en personne sur le terrain. Face au cahier de revendications qui lui est soumis le 27 janvier par les délégués des grévistes, Rebrab promet l’octroi d’une prime de 50 mille dinars, l’amélioration des conditions de travail des ouvriers et "la fin des injustice au niveau de Cevital"

Mais c'est un niet catégorique s'agissant de la création d’un syndicat, une des revendications clés des grévistes. Fin mars, même pour les rémunérations, Rebrab ne tient pas ses promesses, la direction annonce des augmentations dérisoires. Et elle refuse toujours la création d'un syndicat. Une nouvelle grève d'un demi journée est alors observée le 1er avril mais sans la participation massive de janvier. Comme les autres grand groupe algérien, Cevital est un conglomérat familial. La famille Rebrab a mis en branle toutes les ressources du paternalisme pour saper le mouvement.

...Puis frappe un grand coup.

Encouragé par cette faible participation, Rebrab, a estimé le moment propice, pour engager l'épreuve de force. Les 8 et 9 avril 2012, une "commission ad hoc" juge 27 meneurs, prononce des suspensions massives. On fait durer le suspense pour diviser avant d'annoncer seize licenciements. Les travailleurs licenciés  déclenchent une grève de la faim, à l’entrée même de l’usine, pour réclamer leur réintégration. Ils sont soutenus par les partis et les syndicats de Béjaïa qui campent aux abords de l'usine.

Ils ne seront pas réintégrés

Liberté, le journal de M. Rebrab  sort du silence observé jusqu’ici. pour annoncer : « Les grévistes mettent fin à leur protestation » et nous explique que son patron, bon prince, en plus du retrait de sa plainte contre les grévistes, « a décidé d’attribuer une aide financière comme mesure humanitaire en solidarité avec les familles des intéressés ». Curieuse manière pour les communicants de M. Rebrab de présenter l’indemnité de licenciement que Cevital a payé aux salariés, licenciés abusivement, en échange de leur signature d'un solde de tout compte. «Sur conseil de notre avocat, nous avons cessé aujourd’hui notre grève, épuisés certes, mais réconfortés par toutes les marques de solidarité qui nous ont été témoignées», déclare à El Watan, Abdellah, un représentant des grévistes.

Issad Rebrab champion des grands patrons

Sous le titre . La grève de Cevital révèle la précarité du droit syndical chez le privé  Abdelkader Zahar , écrivait dans Maghreb Emergent, le 6 Février 2012 : "La grève générale, du 19 janvier dernier, dans les usines de Bejaïa du Groupe de Cevital, a eu pour objet des revendications salariales mais également, à la surprise de l’opinion nationale, la revendication de l’exerce du droit syndical. Ce conflit de travail qui a frappé le premier site de production du premier groupe privé algérien a été l’occasion de mesurer, l’immense retard de la syndicalisation en contexte d’entreprises privées en Algérie. De plus en plus de tensions internes à ses entreprises, ont pour revendication première l’instauration d’un syndicat au même titre que les revendications traditionnelles de la hausse des salaires et de l’amélioration des conditions de travail. L’absence d’activité syndicale touche des grands acteurs de l’agro-alimentaire, de la boisson, de la distribution automobile, de la téléphonie mobile, des matériaux de construction et de l’électronique grand public".

Les conglomérat familiaux préfèrent les syndicats maison.

En novembre 2013, l'envoyé spécial du journal Jeune Afrique faisait le point de la situation à Béjaïa : "Cevital Agro ne compte toujours pas de syndicat, mais un comité de participation de onze membres".

Le journaliste rapporte la définition cynique du pdg de Cevital-agro, Francesco Goula-Mallofré, à propos du comité- maison mise en place à la place du syndicat : « La seule différence avec notre comité, c’est qu’un syndicat serait soumis à des syndicalistes externes, qui probablement voudront appliquer à Cevital une politique externe, sans vraiment connaître l’entreprise, qui plus est en y mêlant de la politique". Un argumentaire antisyndical qui remonte au 19è siècle européen. Vivement un nouveau code du travail où les représentants des salariés seront coiffés par les employeurs.

Interrogé sur la question syndicale par Abdelkader Zahar, le journaliste de Maghreb Emergent cité plus haut, Slim Othmani, le patron de la NCA-Rouiba déclare : « Le code du travail est en inadéquation avec l’Algérie que l’on veut construire. Tel qu’il est aujourd’hui, il renferme des conditions qui ne sont pas en phase avec le savoir faire syndical. Le code du travail m’oblige de présenter la stratégie future de l’entreprise à l’appréciation du syndicat. Je réfute cette disposition. Elle n’est pas censée dans le contexte concurrentiel d’aujourd’hui.".

 

 

 

 

 

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