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Le blog de algerie-infos

"La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé. Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve" Djalāl ad-Dīn Rūmī (1207-1273)

L’Etat de droit est dorénavant une revendication de masse

Le pouvoir est-il amnésique. Comme à Laghouat aujourd’hui, en juillet dernier face à l’absence d’état de droit dans les critères d’attribution des logements sociaux, des mouvements d’occupation de l’espace public avaient été engagés par les citoyens et pas seulement par les demandeurs, pour exiger l’application stricte des règles.

Notre blog avait suivi avec attention les luttes de ce mois de juillet, auxquelles nous avions consacré quelques notes signées S. A.

 Saoudi Abdelaziz, 14 janvier 2012

 

 

8 juillet 

Logements sociaux : le chef de l’Etat laisse faire

 

Le mouvement pour l’application de la loi dans l’attribution des logements sociaux ne faiblit pas, et touchent les différentes régions du pays. Face à cette revendication nationale, la coalition politique au gouvernement n’ose pas affronter ce qui fait parti intégrante de son fonctionnement : le clientélisme et les réseaux d’influence.

Pendant que le gouvernement se tait, le chef de l’Etat laisse faire : les commis de l’Etat, chefs de daïra et walis, doivent-ils être abandonnés à leur sort,  placés en première ligne pour gérer les conséquences de pratiques illégales et anticonstitutionnelles généralisées? Les Algériens en sont réduits à couper les routes. Faute d’une réponse globale claire en faveur des revendications légitimes, il est à craindre qu’encore une fois, les «dépassements» - parfois provoqués par les officines obscures- et la répression policière et judiciaire prennent le dessus, hypothéquant la recherche d’issues globales à la crise de l’Etat (…).

A Laghouat, les critères de la loi

«Le népotisme et le favoritisme ont pris le dessus sur les véritables critères définis par la loi». C’est ce qui motive le mécontentement à Laghouat,  selon les propos d’un protestataire rapporté par Abderrahmane Semmar d’El Watan. Les manifestants qui ont bloqué pendant cinq heures, la nationale 1 qui relie Laghouat à Alger, dénoncent l’attribution de 480 logements dans des «conditions obscures». La révision de la liste dans la transparence, c’est l’exigence des familles, décidées à camper devant la wilaya jusqu’à la satisfaction de leur droits légitimes.                       

 

9 juillet

Ould Kablia croit culpabiliser les Algériens

 

Ould Kablia s’est expliqué, hier, devant les députés, sur le mouvement de contestation des attributions de logements sociaux, qui a touché toutes les régions du pays. Il fait tout d’abord semblant de ne pas comprendre. « L’Etat ne pouvait satisfaire tout le monde » dit-il. Mettant alors sous le boisseau les témoignages publiés dans tous les journaux, le ministre peut alors affirmer que les protestataires ne sont que des impatients, qui «ne remettaient pas en cause le droit des bénéficiaires au logement mais le retard mis dans l’arrivée de leur tour de livraison».

Mais confronté à cette réalité de la revendication citoyenne des critères, c'est-à-dire de respect de l’Etat de droit, Ould Kablia contredit ,comme par mégarde, son souverain postulat, lorsqu'il conteste que le chef de daïra et le maire soient responsables du processus d’attribution. «Car les listes sont étudiées au niveau d’une commission regroupant même les représentants des comités de quartiers et des citoyens», précise-il.

Première règle de bonne gouvernance, partagée par la communauté des ministres de l’Intérieur : culpabiliser les administrés en toutes circonstances. Tous coupables! D’où le message : s’il existe - peut-être - un problème d’attribution, la raison en est à rechercher aussi chez les «représentants des citoyens».

Le ministre n’a donc pas à se préoccuper si ces représentants sur le papier,  sont en fait cooptés par les réseaux d’influence et de clientélisme au service des partis de son propre gouvernement. M. Ould Kablia, ancien du Malg, ne se préoccupe que de haute stratégie.

 

12 juillet

 Révoltes populaires : silence des politiques et faux radicaux

 

La Wilaya d’Alger a donc décidé de détruire la forêt du Bois des Pins à Hydra en vue de construire un parking. «Y a-t-il quelqu’un qui convoite le site pour ses besoins ?» s’interroge aujourd’hui l’éditorialiste d’El Watan. En effet, cette opération ne vise pas les quartiers huppés d’Hydra. Est visé un quartier de salariés et de cadres.

Les Dernières nouvelles d’Algérie (DNA) publie aujourd’hui un reportage où un habitant du Bois des Cars affirme : « Je vais vous dire moi ce qu’il en est : ils ne feront pas de parking. Tout ce qu’ils veulent c’est récupérer l’assiette de l’immeuble, le détruire et nous reloger ailleurs. Nous ne sommes pas des voisins désirables pour ces gens-là. Comment expliquez-vous qu’ils aient fermé l’école primaire en face de chez nous. Depuis trois mois, nos enfants étaient dispatchés dans d’autres écoles plus loin. Parfois jusqu’à Bir-Mourad-Raïs. Il existe bien d’autres écoles primaires à côté mais allez inscrire vos enfants là-bas ! Impossible, cette école ne nous est pas destinée. Elle leur est réservée à eux». Le Temps d’Algérie suggère de son côté que cette affaire met en jeu de gros intérêts en rapportant des propos qu’aurait tenu le maire local : « cela me dépasse ». Un membre du conseil des sages du quartier expliquait la situation dans Liberté d’hier : « Tous cela pour un projet de parking qui ne profite qu’aux gros bonnets de Sidi-Yahia qui ont l’intention de construire un centre commercial sur un terrain Habous du côté du cimetière. »

L’opposition désarçonnée ?

 

Sur cette affaire qui remue les Algérois, c’est le silence radio des politiques, que n’explique pas la main mise de l’Etat sur les médias publics. L’une des caractéristiques de la classe politique algérienne, c’est l’étrange indifférence à l’égard des luttes concrètes des salariés, des demandeurs de logements, des manifestants pour d’eau, le gaz, l’électricité, les infrastructures collectives. Mouvements dont l’ampleur crève les yeux. L’opposition semble aussi désarçonnée que le pouvoir face à cette nouvelle situation. Ce sont pourtant ces mouvements qui dévoilent les forces qui font main basse sur l’Algérie. Le FFS, par exemple, qui s’affirme pourtant extérieur au système, reste polarisé sur la critique incantatoire, presque théorique, de ce système, sans prendre en compte l’urgence à faire jonction, en le soutenant activement, avec le mouvement populaire, tel qu’il s’exprime aujourd’hui contre ce système .

C’est à travers ce mouvement, venu d’en bas, que s’affirmera concrètement l’exigence du changement. Le FFS reste silencieux, même si son conseil national a manifesté, dans sa réunion du début juillet, un soutien platonique au «mouvement social».

L’absence sur le terrain des démocrates progressistes est aujourd’hui incompréhensible. La crainte de jouer le jeu des manipulateurs est légitime. Mais cet excès de prudence, à l’égard de la levée de masse qui se fait jour, favorise aujourd’hui les manipulations du système qui travaillent à dévoyer –notamment en suscitant de faux radicaux- le mouvement populaire, même si ces manipulations politico-policières ont perdu de leur efficacité face à une population qui a appris à mieux connaître les ficelles des stratèges de la tension.

 

 

22 juillet  

Le contenu social du changement démocratique s’affirme

Le mouvement social émerge par vagues successives depuis le printemps. Les formes particulières qu’emprunte en Algérie la volonté de changement commencent à susciter la réflexion parmi les élites.

On se rappelle que les premières grèves «du ventre», celles des postiers, des cheminots, des hospitaliers, des éboueurs et des autres communaux, celles des ouvriers du bâtiment et des métallurgistes, avaient suscité parmi les «élites» des réactions de déception, presque de rejet, par rapport aux grandes levées démocratiques et anti-autoritaires, à l’Egyptienne ou à la tunisienne.

Chez nous, la volonté de changement creuse son sillon, non seulement dans l’exigence de pouvoir d’achat, mais aussi pour le logement social, pour l’eau et l’électricité. On observe, d’est en ouest, au delà des excès -souvent manipulés par les mafias policières et soulignés en gros titre par la presse- , une sorte d’exhultation citoyenne, de conscience de la force retrouvée. Mais aussi l’accumulation diffuse de capacités d’organisation.

Le contenu social du changement national et démocratique s’affirme comme au Premier novembre. Comme si les Algériens tiraient la leçon des tentatives de confiscation post révolutionnaire, en Tunisie et en Egypte.

 

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