13 Août 2017
Ces dernières semaines seront-elles pour les Algériens, comme on le pressent, une riche "leçon de chose" permettant le dévoilement des mécanismes à travers lesquels s'est progressivement installé le pouvoir oblique des Forces de l'Argent?
La mission de brouillage d'Ahmed Fattani n'est pas achevé. Le "journalisme" de rupture que le directeur de l'Expression pratique laisse penser que ses commanditaires veulent aller jusqu'au bout. Le scribouillard ne lâche pas sa proie qui est pourtant en vacances. Il le suit à la trace : "Son ordre de mission officiel a été établi pour Nice en France. Attendu pour ce week-end à Alger, il est annoncé, à la surprise générale, à Istanbul en Turquie avant d'atterrir en Moldavie", écrit-il ce matin. Il donnera plus loin l'explication de ces détours : "Tebboune est bel et bien parti dans une logique d'autodestruction: son penchant quasi névrotique pour le pouvoir lui a fait perdre jusqu'au sens des réalités pour l'installer confortablement dans l'imposture".
"Personne n’est dupe"
C'est le titre de l'éditorial de Sofiane Aït Iflis dans Liberté.
"Car, au final, on ne sait toujours pas si Bouteflika a véritablement tancé son Premier ministre ou s’il s’agit d’une intox savamment orchestrée par des oligarques puissants, évoluant dans la proche périphérie du pouvoir, pour disqualifier un chef de l’Exécutif qui, en travaillant à dissocier l’argent de la politique, risque de compromettre leurs desseins. Djamel Ould Abbes, qui, pour espérer convaincre, jure plus qu’il ne démontre ou prouve, a, encore une fois, choisi d’être vague là où il devait être précis. Pendant qu’on attendait de lui la confirmation de la réalité et la véracité des actes attribués au président de la République (les reproches qu’il aurait signifiés à Tebboune), Ould Abbes botte en touche. “L’instruction peut être verbale”, dit-il. Tiens, on a failli l’oublier ! Mais cela n’éclaire pas notre lanterne. Enfin, personne n’est dupe de rien.
L'enjeu fondamental
Saad Ziane écrit dans Libre-Algérie:
"Le poids politique grandissant des hommes d’affaires dont le point d’appui névralgique au sein du pouvoir est Saïd Bouteflika, formellement conseiller du chef de l’État mais «informellement » beaucoup plus, s’affiche de manière ostensible. Au détriment de la bureaucratie d’État qui a créé les affairistes et qui découvre – du moins une partie de cette bureaucratie – qu’elle lui conteste aujourd’hui ses prérogatives et ses pouvoirs".
EXTRAIT:
"Le contenu des instructions est une victoire des oligarques qui ne se cachent plus pour grandir. Ils sont une partie du pouvoir et ils tentent, dans cet intermède triste dans lequel le pays est plongé, de ramasser la mise pour être le pouvoir. Avant que la fin de l’intermède ne rebatte les cartes.
Le seul ennui que provoque Tebboune au clan des oligarques est que sa tentative éclaire bien l’opinion sur le pouvoir grandissant des affairistes et sur leur appétit. Les mesures décidées par Tebboune, décriées comme d’habitude par les économistes libéraux, relèvent d’une tentative de gérer une situation de baisse sensible des recettes hydrocarbures.
Séparer « l’argent et l’État » voulait dire au moins que le gouvernement allait cesser de faire des largesses aux affairistes. La riposte est venue à travers une campagne de presse – aux accents parfois inénarrables et ridicules – suivie d’un désaveu « officiel informel » du chef de l’État.
Sur le fond, cela indique que face à la crise financière, la variable d’ajustement ne viendra pas par une limitation des appétits des affairistes, mais par des politiques antisociales ciblant les classes populaires. C’est l’enjeu fondamental : qu’elle sera la variable d’ajustement face à la crise ? Le charivari de la haute-cour nous en donne une indication".